mardi 23 juin 2009

Il fallait en parler !?

La séquence qu'il vient de nous offrir, de la réunion du Congrès jusqu'au remaniement ministériel, mérite qu'on s'y arrête un instant. Hier donc, à Versailles, nos élus ont eu la chance de pouvoir l'écouter. Versailles et la République, quelle belle histoire !! En 1789 c'est la jeune assemblée et le peuple de Paris qui ramenaient le roi à Paris, aujourd'hui c'est lui qui les y amène. En 1871 les joyeux Versaillais estampillés républicains s'amusaient à exécuter 30 000 communards en une semaine, et en 1919 on y a signé le plus absurde des traités de paix pour humilier nos voisins défaits. Ha ! Si Versailles m'était conté, sûr que cet épisode n'y trouverait place ! En revanche, si Versailles m'était compté...


Hier donc, devant un parterre de parlementaires réduits au silence, devant députés et sénateurs privés de vote, sa magnificence a fait appel à son peuple en faisant "don de sa personne à la France". En agissant ainsi, il égale son illustre prédécesseur, Napoléon III dans son usage du plébiscite: certain de ne pouvoir obtenir le soutien de son action dans les urnes, il fait appel à celui des portefeuilles par un "grand emprunt national".
Sûr que cet emprunt sera un grand succès, que les sommes obtenues dépasseront les estimations les plus optimistes ! Les Français videront leur bas de laine flairant la bonne affaire au regard d'un taux de rémunération du livret A , sans doute ramené à 1% dès cet été.
Cher lecteur, tu comprendras que je ne m'attarde pas ici sur les risques encourus par cette pratique. Simplement une remarque au passage : l'endettement de la France pour cette année et la suivante dépassera les 7%. Or, cet emprunt devra être remboursé dans quelques années : Réjouissons nous, nous voilà assurés (en ces temps incertains) de conserver notre dette ! Tout çà sans politique de relance de la demande !
Comment rembourser cette multitude de créditeurs de l'Etat ? Par les impôts bien sûr ! Ainsi, ce que vous avancez aujourd'hui, vous vous le rembourserez demain, sauf si vous êtes soumis au dur régime de l'ISF qui sera supprimé d'ici là...
Dernier point : les anciens emprunts d'Etat ont toujours été annoncés par le premier ministre. Aujourd'hui, François Fillon est totalement court-cicuité ainsi que l'ensemble de tous les corps intermédiaires. Ce procédé inédit, en plus de ridiculiser le premier ministre, confine au démagogisme en action. François, tu peux courir te cacher.
Pas de rigueur, pas d'augmentation des impôts a-t-il promis. Pourtant, on voit fleurir une taxe carbone, une diminution plus forte que prévue du nombre de fonctionnaires, aucun coup de pouce pour le SMIC, une augmentation du tarif de l'électricité et une stabilité de celui du gaz alors même que ce dernier est censé être indexé sur le cours du pétrole. Accessoirement, on comptera fin 2009, pratiquement un million de chômeurs de plus qu'un an plus tôt, soit plus de 10% de la population active au chômage. Accessoirement toujours, Seguin, président de la cour des comptes s'inquiète dans les colonnes du Monde d'un "risque de accroissement exponentiel de la dette".

Bilan de la journée ? Une République bafouée, un premier ministre humilié, une opposition piétinée, Français, si vous me prêtiez ?

Mais notre éminence ne souhaita pas s'arrêter en si bon chemin. Il s'agit de pousser l'avantage d'élections prétendument gagnées. Or, qu'aurions nous eu si ces dernières avaient été analysées comme une défaite pour la majorité? Eh bien, un remaniement bien sûr ! Annoncé par qui ? Le premier ministre, naturellement ! Pour arrondir les angles, il aurait fallu poursuivre l'ouverture. N'est-il pas curieux que le procédé reste identique ? Victoire ou défaite, de toute façon le remaniement était programmé. Seul celui qui l'annonce change en fonction des résultats : "mais non, François, ne t'en va pas, ne boude pas, je te garde quand même". Hé oui, cher lecteur, tu n'es pas sans ignorer que constitutionnellement parlant, c'est le chef du gouvernement qui présente à l'approbation du président son gouvernement. Tu es bien caché François ? Étrange que tu ne te sois fendu d'aucune déclaration entre ces deux épisodes historiques. Tu sembles souffrir, c'est ta sciatique ou encore un peu plus bas dans le dos?
En dépit d'élections triomphales donc, le remaniement. En dépit d'un PS déjà bien moribond , la poursuite de l'ouverture. Le petit a en effet agité son hochet et il est tombé sur Frédéric Mitterrand qu'il avait déjà envoyé 18 mois plus tôt à la villa Médicis . L'ouverture a bons dos, ce même F Mitterrand avait appelé à voter Chirac dès 1995...
Mais qu'importe ! ! Voilà l'heureux évènement ! Car il a tout lui aussi : un nom, un pédigrée, des paillettes, un beau réseau chez les artistes bon ton que fréquente la First Lady à la con, et même en prime du caviar ! Nous voilà assurés pour des jours et des jours d'un tapage médiatique assourdissant assorti d'un sentiment de trahison chez tous ceux qui plaçaient encore un reste de confiance dans l'intelligentia modérée de la rive gauche. Politiquement, la prise ne signifie rien. Symboliquement elle est considérable. Gageons cependant que l'abcès est désormais crevé entre les électeurs et les représentants de gauche.

Bilan de la deuxième journée : Un premier ministre humilié sur la place publique, des reniements en veux tu en voilà parmi les ministres, un écran de fumée (F Mitterrand), et sa majestée au centre de la mélée mais en même temps au dessus, pantin comme tous les autres dans la situation économique mondiale avec un pays qui se ruine sous ses pas.

Plus généralement, la bulle qui sépare la population et ses élus s'épaissit : les incertitudes des uns ne rencontrent plus les inquiétudes des autres. Dans le microcosme, on s'agite, on s'ébaudit, on entonne le refrain des chaises musicales et on joue au qui manipule qui. Dans le macrocosme, on fait les comptes pour passer ses vacances au camping, on hésite pour la mise en faillite de sa boîte en septembre ou on craint le dégraissage d'automne, à moins que l'on soit déjà inscrit au Pôle emploi.

A force de ruptures, la boussole perd le nord. Notre pays est aujourd'hui dépourvu de ses repères passés et en quête d'une direction. Car soyons clairs, quel avenir nous fait-on miroiter ? On explique partout que le but est de revenir à la situation antérieure (retour de la croissance) ou bien à celui d'un hypothétique âge d'or (celui de l'équilibre des comptes).
La justice sociale par la résorbtion des inégalités ? Des services publics qui garantissent l'égalité sur l'ensemble du territoire, des hausses de salaires pour relancer le pouvoir d'achat et la consommation ? Des taxes sur les spéculateurs ? Non, rien de tout cela n'est évoqué : tout juste un espoir dans l'accession au crédit (le droit de s'endetter davantage ! ), la compression des salaires, l'allongement de la durée de cotisation, le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux..

Cette situation est en réalité des plus absurdes, car toutes ces décisions présentées comme pragmatiques, répondent à une pure idéologie néo libérale. Penser, aujourd'hui encore !, que l'on va relancer par l'investissement alors qu'on a à faire à une crise de la consommation (par un trop fort endettement) relève de l'aveuglement idéologique.

Je crains fort qu'il n'y ait rien à retenir de cette séquence en deux temps, finalement elle ne méritait pas qu'on s'y arrête. Désolé, cher lecteur.

lundi 15 juin 2009

La retraite revient au galop !


Le boutefeu Hortefeux n'ira pas au parlement européen. Ben oui quoi, s'il s'était mis sur les listes en Auvergne c'était sans doute pour faire du nombre. Se présenter en espérant ne pas être élu, y en a qui devraient l'imiter à l'UMP, ça nous soulagerait ! Des candidats? Dati ? Ah oui, déjà çà ! Et, en attendant, le rouquin reste au gouvernement car il est indispensable au dialogue social ! Si, il a la confiance des syndicats ! Sa méconnaissance des dossiers est en fait une chance inouie. Problème, il a, lui aussi, des consignes.

Vous en avez peut être vaguement entendu parler, depuis le 7 juin, mais il semblerait que la situation financière de la France pose quelques soucis. 20 milliards pour la Sécu, 72 pour le déficit budgétaire... et plus rien pour les retraites. Et oui, il va falloir travailler plus...longtemps. C'est la p'tite bombe d'avant les vacances, juste après le derner rendez vous social du 13 juin. Hop, ça y est, c'est dit. Personne ne réagit, parfait, on se met au boulot à l'automne prochain.

67 ans, premier chiffre annoncé. C'est ce que l'on peut "obtenir de mieux" mais dans ce cas, il faudra sans doute aussi augmenter les cotisations. Donc on va travailler plus longtemps, payer davantage (en volume et en durée) pour une retraite de toute façon tronquée. Les entreprises, qui passées 50 ans cherchent à se séparer de leur salarié, trop cher et relativement peu productif si on le compare à un jeune aux dents longues, ne feront rien pour garder les plus vieux. Le chômage des séniors, dans ces conditions, va exploser. Deuxio, les départs à la retraites à taux pleins constitueront de plus en plus l'exception. Paupérisation des troisième et quatrième âges à qui les fistons seront contraints de financer les maisons de repos.

Sous Balladur, le privé se voyait "condamné" à cotiser plus longtemps, sous Juppé, la Sécu remboursait moins,sous Raffarin, la retraite du public fut alignée sur celle du privé, sous Villepin on proposa aux jeunes de travailler pour moins, sous Fillon, on doit travailler plus tard à nouveau. Si on compte (rapidement) Fin des 35 heures et retour à environ 39 heures pour tous (plus incitation aux heures supplémentaires), un jour férié en moins et au moins 5ans de boulot en plus : quelques dizaines de milliers d'heures de travail supplémentaire pour chacun en dix ans ! Décidément pour la droite il faut vivre pour travailler !

Vit on mieux ? A-t-on retrouvé la croissance ? Y a t-il moins de chômage ? Moins d'échec scolaire ? Moins d'insécurité ? Non, vos heures sup n'ont pas cette vocation

A t-on renfloué des banques? L'automobile ? Bernard Tapie ? François Pérol ? Les restaurateurs ? Les médecins ? Voilà à qoi ça sert de bosser plus.

Forcément, tout est défiscalisé. Les recettes s'effondrent (et pas besoin de "crise" pour expliquer cela) et les dépenses s'accroissent.

Les syndicats, les partis d'opposition sont silencieux et complices de cette situation. Incapables de proposer une alternative, ils vont encore être contraints de s'opposer pour la forme et abandonner la lutte.

Cher lecteur, l'an prochain vous travaillerez plus...ce qui vous laissera plus de temps pour me lire au bureau.



samedi 13 juin 2009

La gauche et le conservatisme (Vite dit)


Progressistes, modernes, dépoussiérés. Voilà comment la plupart des leaders de gauche (où se prétendant comme tels) veulent apparaître aux yeux de l'opinion. Décomplexés, "désidéologisés", pragmatiques, soucieux d'apporter des "réponses concrètes". Convaincre l'électeur que l'on regarde bien l'avenir.

Quand le programme politique se mue en "bonne gouvernance", lorsque le progrès social se transforme en "meilleure répartition des revenus", quand "non à Barosso" permet de mettre "Europe sociale" au placard, quand "idéologie" devient pragmatisme gestionnaire,


Ces mutations linguistiques supposent un renoncement. La gauche d'aujourd'hui c'est la "boutique de l'homme moderne" en tout aussi ringard. Il faut le répéter rien ne vieillit plus vite et plus mal que le résolument contemporain et le moderne. Le moderne de la veille est le kitch du lendemain...

Hier encore l'écolo était d'avant garde, aujourd'hui il connaît son apogée, demain, il sera ridiculisé.

Le monde politique est, dit-on, partagé entre progressistes et conservateurs. La droite française actuelle affirme se reconnaître dans les deux, la gauche n'accepte que le premier.

Comment l'expliquer ? Historiquement, il est certain que la gauche fut la force du mouvement, du changement, du progrès social et de la révolution. Ses héritiers considèrent donc que la transformation de la société est une nécessité. Fort bien !

Le problème vient que la transformation progressiste et "socialisante" est d'abord devenue le changement puis mouvement ensuite l'adaptation enfin la flexibilité.

L'aveuglement qui consiste à croire que tout ce qui évolue est "bon en soi" constitue le tabou, le verrou qui empêche toute remise à plat. "Changer la vie" ne signifie rien. Taguieff dénonçait il y a maintenant longtemps, le "bougisme". Le glissement libéral s'est néanmoins poursuivi : l'adaptation de la France et du travailleur à la mondialisation pour être plus compétitif. C'est un renoncement, s'adapter ne peut se faire qu'a posteriori, c'est abandonner l'idée que l'on puisse influer ou orienter le processus (Attitude passive). Cela ne constitue pas un projet politique mais en effet une gestion quotidienne pragmatique du présent. Autre facette du renoncement : S'adapter à un contexte global sur lequel nous n'avons aucune prise signifie être disposé à abandonner l'existant dans le seul but d'évoluer, de bouger etc. (Attitude active). Par notre attitude passive face à l'avenir, nous nous activons à détruire le présent.

La "défense des services publics" et des "acquis sociaux" demeure pourtant la chasse gardée de l'ensemble des partis de gauches. Préserver le "modèle social" renforcer l'"exception culturelle" également. Cette attitude a un nom : le conservatisme. Il est grand temps que la gauche n'ait plus honte de ce qu'elle est et doit être : une force de transformation constructive et non destructive. Le passé ne saurait être sacrifié sur l'autel d'un avenir par définition incertain.

Les mots en politique sont plus importants qu'ailleurs, le jargon moderniste et technocratique doit s'effacer et la gauche s'exprimer dans une langue compréhensible. C'est la seule issue, il doit bien y avoir la place pour un conservatisme social dans le progressisme !!

lundi 8 juin 2009

Quel chantier !




L'Europe d'abord.

Si on se penche sur les résultats de ces élections au niveau européen, il faut d'abord retenir un chiffre : tout juste 2 européens sur 5 se sont déplacés. Ce que cela ne veut pas dire que :
1/ Les Européens ne comprennent pas l'UE
2/ La démocratie européenne se porte mal.

En réalité cela montre l'incapacité à construire une Europe démocratique. Les objectifs du processus d'intégration se révèlent contraires à celui de la démocratisation. C'est ce gouffre que les citoyens européens ressentent d'abord. L'opinion européenne existe d'ailleurs sur ce seul point : l'UE n'est pas le lieu de la démocratie, elle n'a pas vocation à l'être. La cogestion entre la droite et la gauche européennes amène ce constat désabusé : La démocratie ne doit pas relever du consensus mais s'apparenter à la tyrannie de la majorité, et il ne saurait en être autrement.

Un essai de lecture européenne des résultats

Cela explique l'effondrement des sociaux démocrates (incapables de transformer l'UE donc électeurs qui s'enfuient) et la stagnation de la droite traditionnelle. Le vote contestataire de droite est puissant à l'Est (dans les 12 derniers entrants) et dans les pays nettement européophobes de l'Ouest(GB /Flandres- Pays Bas / France dans une moindre mesure). Le vote contestataire de gauche réalise ses plus beaux scores à l'Ouest (Pour faire simple, ceux qui n'ont pas connu le communisme) A l'Est, le vote d'extrême gauche n'est que la fin de la comète communiste. Il n'y a pas de place pour l'heure pour une gauche radicale non communiste dans ces pays. En Europe orientale la contestation du système se traduit par l'extrémisme de droite. Partout ou presque, le vote a sanctionné le pouvoir mais plus nettement là où les socio- démocrates l'occupent.
La poussée écologiste est surtout sensible à l'Ouest. L'ancien Est soviétisé demeure un inconditionnel partisan productiviste : "Avoir des usines c'est la santé, polluer c'est le signe de la croissance et du plein emploi". Les opinions publiques n'y sont pas animées de cette fabuleuse croyance en la "croissance verte" qui semble avoir animée les coeurs de la frange boboïsée des citoyens de l'Ouest européens (sauf dans les pays latins). La cartographie du vote écolo se limite en fait au quart nord ouest de l'Europe soit dans les pays les plus riches. L'écologie devient l'idéologie dominante de ceux qui se peuvent se payer le luxe de ne plus en avoir. C'est en effet dans les pôles urbains les plus riches d'Europe que le vote écologiste est le plus fort : Paris intra muros, Bruxelles, Berlin... Or, il n'est pas certain que l'on puisse faire accepter l'idée à celui qui souffre (ou à celui qui profite le moins) qu'il faille s'occuper de la santé de la planète avant la sienne.

Les 40 % d'européens qui ont voté ont envoyé le message suivant : Une majorité dit : autant continuer ainsi. Une minorité espère tout foutre en l'air. Les 60% d'européens qui n'ont pas voté ont dit : Cela ne présente aucun intérêt, de toute façon rien ne changera.

En Europe donc, rien ne changera dans l'orientation. Mais les forces centripètes : abstention, euro scepticisme, populisme et nationalisme sortent grands vainqueurs. Le"grand tout" va continuer à s'élargir, à se scléroser sur une base toujours plus étroite et sceptique. Le parlement européen est plus éclaté que jamais, il va devenir plus difficile de le gouverner.

Honnêtement je ne vois pas ce qui pourra faire qu'un jour ces élections retiennent plus l'attention des peuples européens. Le taux d'abstention ne cesse d'augmenter alors que le pouvoir de Bruxelles croît parallèlement.

La France maintenant

Une élection sans vainqueurs

Pour la petite histoire l'UMP fait le score du PS en 2004 et inversement. Modem+Verts en 2009= 25% UDF+verts en 2004= 20% Front de gauche = PCF en 2004 FN 2009 -2.5 % Libertas 2009= MPF 2004

Ces élections sont le miroir de celles de 2004. Aux extrêmes pas ou peu de changement. Pour les modérés le grand chambardement.

L'UMP derrière les façades n'est pas si satisfaite. Moins de 28% pour la "majorité" c'est un peu court. Peu de réserves chez Libertas ou le FN. Sa réserve de voix est chez les abstentionnistes mais si ce score est flatteur dans une élection proportionnelle à un tour, il peut inquiéter dans la perspective des régionales. Moins de 5 millions de personnes ont soutenu l'action du président hier. C'est pour cela que le pouvoir va sans doute se contenter d'un remaniement a minima, ne pas prendre de risque tout en affirmant "poursuivre l'ouverture" et mener des "réformes".

Les Verts seraient ainsi les grands gagnants. Dans les semaines à venir il est probable que certains de leurs leaders reçoivent des coups de fil de l'Elysée, "un p'tit maroquin ?" Leur succès est en trompe l'œil. L'unité des verts est fragile, plus exactement elle a été faite pour ces élections. D'autre part, les Verts ont toujours eu leurs meilleurs scores lors des Européennes. Ces élections ne font pas des Verts la deuxième force de gauche en France. Les raisons de leur succès électoral sont diverses : Porteurs d'un message qui s'inscrit naturellement dans le cadre européen, des personnalités nombreuses et variées (du repris de Justice au juge en passant par l'anarchiste repenti )qui ont pu personnaliser cette élection, la diffusion du documentaire "Home" sur France2, l'altercation Bendit-Bayrou...). Mais Europe Ecologie n'a pas de militants, de revenus, d'élus, de députés en nombre suffisant. Et ils sont tout aussi partagés sur la question économique : entre adeptes de la décroissance plus protectionnistes et libre échangistes apôtres de la croissance verte. Enfin et surtout, cette union n'avait pas vocation à durer ailleurs qu'au parlement européen. Les Verts sont "dépassés" par leurs score et vont retomber dans l'anonymat dès l'Automne, au plus tard lors des régionales de 2010.

Le Modem rate le coche faute de n'avoir pas su séduire à droite par un Bayrou trop clairement dans l'opposition et d'avoir été siphonné par les écolos dont l'absence de marqueur idéologique clair a pu séduire une partie des électeurs du Bayrou version 2007. L'avenir politique de Bayrou n'est pas encore obstrué mais le Modem, trop hétéroclite, risque de sombrer.

Le front de gauche connaît un succès mitigé. Il réalise un peu mieux que le PCF en 2004, mais atteint tout juste les 6%. Il est au niveau du FN et devance le NPA. Il voulait faire chuter le PS, ça s'est fait, mais sans lui. Donc plus d'alternative, s'il veut survivre il devra se contenter d'être une force d'appoint pour une gauche en reconstruction, il doit oublier la recherche d'alliance avec le NPA. Problème, ses relations avec des Verts requinqués sont conflictuelles. Il reste dépendant de la recomposition qui s'annonce au PS.

Le PS se prend une veste, une belle veste mais peut être insuffisante : il reste le pivot de la gauche en dépit de la profondeur de la crise qui l'affecte. Ce que l'appareil du parti risque de faire est une nouvelle fois de temporiser. Le rapprochement avec Bayrou de son aile droite n'est plus possible dans l'immédiat au vu du score calamiteux du Modem. Son aile gauche est décapitée, Hamon n'est pas réélu. Cependant le grand manitou Emmanuelli n'envisage pas de quitter le navire. L'aile gauche est affaiblie et paralysée. Royal n'interviendra sans doute pas directement, elle est dans un autre tempo, et surtout Aubry a très peur d'esquisser tout mouvement. Ce qu'il risque d'advenir pour les mois à venir est une mise sous tutelle encore plus forte d'Aubry, un renforcement des royalistes à la direction. Histoire d'aller unis au massacre des régionales l'année prochaine. Après cette nouvelle défaite, nous assisterons à l'éviction d'Aubry et à une nouvelle nuit des longs couteaux.
Prêtons nous à rêver, les socialistes les moins autistes comprennent que le dernier avertissement a sonné. Le pot pourri qui sert de viatique au PS n'est décidément plus digeste pour les électeurs. On remet tout à plat et on discute du fond par le biais de grandes assises du PS, ouvertes. On constate alors que sur nombre de sujets, les opinions divergent (sécurité, immigration, Europe, laïcité, services publics, libre échange, protectionnisme...) On pose une plaque commémorative à Solférino "Ici gît le PS, nous ne le regretterons pas" signé "les socialistes et les libéraux". Recomposition de la gauche entre "démocrates-écolo" et "socialistes". Recherche d'accords en vue de gouverner et organisation de primaires de toute la gauche en vue des présidentielles.

Un programme, une stratégie, un leader. Finalement c'est tout ce qu'il manque. Mais l'occasion est trop belle pour ne pas s'en saisir : Débattons, enfin.