dimanche 24 mai 2009

Un SouSi pour la police ?

Rien ne va plus au royaume de la dictature molle. Le bras armé, entre excès de zèle et désillusion, ne sait plus à quel saint se vouer.

La police française est dans un sale état et nous pouvons d'abord nous en réjouir, le vieux fonds anarcho libertaire rejaillit dans ces conditions au plus profond de nos entrailles et, comme chacun sait, le fruit de nos entrailles est béni. (oui oui)

Des dérives plus nombreuses jusqu'au ridicule

Plus sérieusement, l'actualité policière défraie la chronique quotidiennement. Hier, c'était 70 agents de EDF-GDF placés d'un seul coup en garde à vue, avant hier et encore aujourd'hui, un dénommé Coupat accusé sans preuves de fomenter des déraillements de TGV était incarcéré, pour ses opinions politiques. Il y a une semaine, un enseignant est arrêté en pleine gare St Charles, en journée, pour avoir crié "Sarkozy, je te vois" lors d'une interpellation musclée. Quelques mois plus tôt, l'ensemble d'un collège est passé au peigne fin avec moults chiens,les élèves reniflés, plaqués au mur en pleine salle de classe, pour quelques grammes de cannabis qu'ils n'ont pas trouvé. Aujourd'hui, pour un soupçon de vol de vélo, deux enfants (6 et 10 ans) sont arrêtés par 6 policiers à la sortie de l'école, amenés au comissariat et leurs parents prévenus tardivement. Une procédure "banale" affirme-t-on à la préfecture...bien sûr, mais cela est anecdotique, les deux enfants n'avaient pas commis ce vol. Quelques mois en arrière, le président se rend dans un village de 500 âmes, pour l'occasion on compte pas moins de 1200 policiers. Sommet de l'Otan à Strasbourg, des CRS sont filmés en train de lancer des cailloux sur les manifestants ou à proximité du cortège pour exciter la foule. Manifestation du premier mai à Paris, de faux punks sortent d'un camion de police, bardés d'autocollants "rêve générale" et provoquent une échauffourée. Il ne s'agit que de quelques faits de ces 6 derniers mois, mais j'en oublie beaucoup. Cependant, on pourrait me reprocher de ne faire cas des seuls "dérapages", alors passons aux statistiques.

Zéro tolérance, direction URSS

Courant 2008, plus de 600000 gardes à vue ont été enregistré. Celà signifie qu'environ "un français sur 90 en garde à vue" (Titre d'un article du Monde). Et encore ! On compte les plus de 70 ans et les moins de 10 ans avec ce comptage. Qu'est ce à dire sinon que 5% de la population française "en âge de marcher" a été soupçonnée, embarquée, interrogée, filmée, fichée en une seule année !!
Toutes les études menées ces derniers temps pointent un dégradation sensible du climat entre citoyens et police. Le tout répression passe bien chez les mémères mais celui qui se fait aligner en allant bosser et en rentrant le soir commence franchement à en avoir marre. L'irrespect , l'absence de politesse comme les altercations entre policiers et citoyens, sont en constante augmentation. La police apprend à se faire haïr : la disparition de la police de proximité (tardivement et partiellement rétablie), de prévention, qui patrouille de jour et qui ne débarque pas au milieu de la nuit, sirènes hurlantes, armée jusqu'aux dens et suivie par les caméras de TF1, fut de ce point de vue une erreur politique grossière. Les policiers ne doivent pas passer leur temps à faire des matchs de rugby avec les gosses des quartiers avait dit l'autre, humiliant ainsi, face caméra, un chef de la police toulousaine. Qui s'en mord les doigts aujourd'hui ?

Aveuglement idéologique, Impasse politique

Le climat sécuritaire se renforce encore : entretemps, plus de cagoules, plus de réunion en bande, des peines plus longues des détentions provisoires qui s'allongent, disparition de juges d'instruction, davantage de prisons et de suicides à l'intérieur, des blocages de matons, des tribunaux toujours aussi surchargés, une ministre de la justice enceinte en Dior, en disgrâce,bientôt au parlement européen etc.
Climat sécuritaire et insécurité manifeste cohabitent. Les atteintes aux personnes ont augmenté de plus de 10% ces dernières années. Le taux d'élucidation ne progresse que très peu malgré les quotas que l'on impose aux forces de sécurité. Le bilan est donc catastrophique, loin de limiter l'ampleur de l'insécurité, le tout sécuritaire a eu pour seul effet, de restreindre les libertés de ceux qui n'enfreignent pas la loi. Comme si la peine de mort était dissuasive aux Etats-Unis, comme si le prix élevé du permis empêchait ceux qui ne peuvent se l'offrir de conduire, comme si restreindre le champ des libertés n'agrandissait pas, de fait, celui de l'illégalité. Comme si le fait de se proclamer plus sévère n'incitait pas à la surenchère dans les actes délictueux.
Comme si "brigades scolaires" n'était pas un oximore....
On achève bien les flics à la kalachnikov dans le 9-3 !!

Ca ne marche pas ? Faisons en un argument de campagne !

Puisque tout ce qui a été entrepris sur le front économique et social depuis deux ans a échoué lamentablement, il est grand temps de refaire de l'insécurité un argument de campagne. Qu'importe les chiffres pourvu qu'on ait l'ivresse de quelques baufs, que le taux de testostérone remonte dans les banlieues pavillionaires, que l'adrénaline, la volonté de puissance des faibles et des lâches se réveille telle un volcan d'Auvergne. On va redoubler d'efforts de communication, on va sommer l'opposition de prendre position clairement sur notre projet sur les bandes, un de plus, qui ne sera jamais appliqué (qui se souvient de la loi interdisant les réunions dans les halls d'immeubles, combien de fois a-t-elle été appliquée, quels résultats?, quelle évaluation?). Ca ne mange pas de pain, on va pouvoir gesticuler, mouliner, accuser de laxisme, semer la pagaille, enflammer les esprits, équiper les polices municipales de taser. Quel bonheur !! Français, vous pensiez que le rique était de perdre votre boulot, détrompez vous, le danger est en bas de chez vous !

Quelque part entre les pleins pouvoirs et l'impuissance

Pinot, simple flic, vit un dilemme. Ses conditions de travail se dégradent, une partie de ses jours de congés a été sucré. Il doit, pour gagner plus, remplir ses quotas (on le paie à la com), sa hiérachie l'encourage à en faire plus. Sur le terrain, son action est désapprouvée par un nombre croissant de citoyens, tandis qu'il est confronté à une violence décuplée à son encontre. Il est moins dangereux d'arrêter celui qui grille un stop que le dealer au mileu des barres d'immeubles qui l'attend avec son arme de guerre. Quant au délinquant en col blanc, les enquêtes sont impossibles soit par manque de moyens soit en raison de la pression exercée d'en haut pour classer "sans suite" les dossiers les plus chauds ("la lutte contre la délinquance financière est en régression", autre titre du Monde). Le policier français est notre Stakhanov moderne, érigé en modèle mais esclave. Pimpant mais tremblant dans son uniforme.

Servir l'Etat ou la République ?

La situation devient en réalité explosive si l'on considère que la hiérarchie des missions de police n'est plus respectée: Comment comprendre que l'on intervient si promptement pour dégager la maison corse d'un acteur très moyen mais ami du président ? Comment expliquer qu'un préfet de Bretagne est muté pour avoir osé laisser plus de 2000 manifestants siffler le maître vénéré ? Comment accepter que la police de Seine Saint Denis ait encouragé et récompensé pécuniairement la délation ? Comment interpréter le zèle de ces mêmes hommes pour raccompagner quelques clandestins menottés dans des avions à destination de l'Afrique ? Quel parallèle effectuer quand les forces de l'ordre interpellent des gosses, fils de sans papiers, à la sortie de leurs écoles? Comment lire une haie de CRS garantissant la sécurité de ceux "qui veulent aller en cours" dans les facultés? La situation est intenable. Plutôt que le sens de l'Etat, ne serait-il pas temps que le corps asssermenté reconquièrt l'esprit républicain, le service de l'intérêt général ?

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